Colloque Final ANR LIMINAL (10) YÔDEGÔRI / Narrations, traces - Vidéo - Septembre 2021

Alexandra Galitzine-Loumpet, William Berthomiere, Laura Genz, Myriam Suchet, Abdul Saboor, Dimitri Galitzine

Alexandra Galitzine-Loumpet, William Berthomiere, Laura Genz, Myriam Suchet, Abdul Saboor, Dimitri Galitzine, « Colloque Final ANR LIMINAL (10)  », 20212021

Résumé

Que font aux langues les espaces sociaux de la migration ? De quelles façons mettent-elles à l’épreuve les politiques migratoires ? Que deviennent les sujets et les langues sur le qui-vive face à la langue de souveraineté du pays d’arrivée ? Quelles sont les politiques de traduction, le rôle des « traduisants », bénévoles ou salariés impliqués dans l’acte de traduire sans en avoir ni le statut ni la légitimité ? L’expérience migratoire invente-t-elle des bricolages linguistiques spécifiques – un parler de la migration<em>&nbsp ;</em>composé d’acronymes, de mots inventés, détournés ou codés, de schibboleths, utilisés par les exilés mais aussi,&nbsp ;parfois, par les solidaires et les administrations de l’asile&nbsp ; ? Et si c’est le cas, comment qualifier ce « &nbsp ;migralecte&nbsp ; », le collecter et l’analyser, restituer sa charge subjective, ses violences –&nbsp ;coloniales, racialisées, policières&nbsp ;–, et ses&nbsp ;puissances&nbsp ;–&nbsp ;de dérision, de résistance, de subversion ? Ces questions ont mobilisé les chercheurs du programme multidisciplinaire LIMINAL (<em>Linguistic and Intercultural Mediations in a context of International Migrations</em>, Agence nationale de la recherche / Inalco) pendant quatre intenses années. Aux frontières franco-italiennes et franco-britanniques, dans les campements et structures d’Ile de France, dans des centres d’accueil parfois isolés, à Calais, Paris ou Vintimille, les membres de l’équipe ont repéré ces mots utilisés à l’oral, observé leurs usages et élaboré une méthodologie d’analyse avec les locuteurs exilés et réfugiés. Ce programme résolument et nécessairement collaboratif a appréhendé la place des langues pour ce qu’elle est : une question politique, celle du sens, entre subalternisation et gestion des indésirables. Partir de la langue c’est en effet aborder « la vie souterraine » des exilés selon l’expression d’Erving Goffman, celle qui n’est pas connue des « dominants » de l’asile ; prendre pleine mesure de sa centralité, c’est également interroger sa minoration dans les études des migrations ; évaluer les manques de traduction, c’est enfin s’engager dans la formation de médiateurs pairs, c’est-à-dire dans une professionnalisation des traduisants, tel que le propose le DU&nbsp ;<em>Hospitalité, médiations, migrations</em>&nbsp ;(Inalco)&nbsp ;depuis deux ans&nbsp ;maintenant. </p><p> Pour présenter les résultats de LIMINAL et réfléchir aux enjeux du cosmolinguisme constitutif des situations de migration, le colloque s’articulera autour de plusieurs ateliers, nommés par quelques-uns des plus de 400 mots du migralecte constitué&nbsp ; : <em>welcome</em>,&nbsp ;<em>border</em>,&nbsp ;&nbsp ;<em>violence&nbsp ;–&nbsp ;</em>en anglais et en français, mais utilisés ou compris&nbsp ;dans&nbsp ;bien d’autres langues&nbsp ; ;&nbsp ;<em>tarjuman</em>&nbsp ;en farsi,&nbsp ;<em>tarjoman</em>&nbsp ;en pachto,&nbsp ;<em>dalmechar</em>&nbsp ;en ourdou<em>&nbsp ;–&nbsp ;</em>l’interprète au sens large ; <em>shiou’iyin </em>littéralement le « communiste » en arabe soudanais, terme désignant bénévoles et militants ;&nbsp ;<em>agent</em>, en anglais, ourdou et persan,&nbsp ;<em>muharrib</em>&nbsp ;en arabe&nbsp ;&nbsp ;ou&nbsp ;&nbsp ;<em>samssari</em>&nbsp ;en tigrinya<em>&nbsp ;–&nbsp ;</em>le passeur,&nbsp ;&nbsp ;opposé au sens plus neutre du fonctionnaire de police ou de l’agent de sécurité en français ;&nbsp ; <em>muhajir, </em>l’exilé, le réfugié en arabe mais aussi en dari et pachto&nbsp ; ; <em>Yunan&nbsp ;–&nbsp ;</em>la Grèce, antique terme qui viendrait de Ionie&nbsp ; ;&nbsp ;<em>yôdegôri</em>&nbsp ;en farsi « &nbsp ;souvenir de&nbsp ; », et enfin&nbsp ;<em>boza</em>, migralecte aux sens multiples… Ces table-rondes, avec des communications courtes et des coordonateurs-intervenants, regrouperont différents acteurs de la solidarité et de la recherche, du documentaire et de l’art, dans la droite ligne des <a href="https://liminal.hypotheses.org/1314">ateliers réflexifs du Briançonnais</a> (14-16 mai 2021). Entre <em>lingua franca</em>&nbsp ;et&nbsp ;<em>persona non grata</em>, la&nbsp ;<strong>Lingua (non) grata</strong>, intitulé du colloque comme de l’ouvrage collectif* à paraitre fin 2021, entend contribuer à « déprovincialiser » – au sens de Dipesh Chakrabarty –, la xenobureaucratie et ainsi à penser les conditions politiques d’une hospibabélité.</p>

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