Publié dans Les lettres nouvelles, en février et mars 1958, et jamais réédité depuis, Le cheval est le premier jalon de l’histoire du cavalier-brigadier rescapé des Flandres durant la débâcle de quarante que Claude Simon n’a eu de cesse ensuite de recomposer, à commencer par La route des Flandres, qui paraît deux ans plus tard.
II serait pourtant bien réducteur de considérer Le cheval comme un simple brouillon du roman à venir. Ce “pur cristal taillé, facetté avec art”, comme l’écrit Mireille Calle-Gruber dans sa postface, est un récit singulier et autonome, qui éclaire magistralement l’œuvre de Claude Simon, couronnée en 1985 par le prix Nobel de littérature.
Mireille Calle-Gruber édite un récit de Claude Simon, Le Cheval avec une Post-face "Ce qui ne meurt pas" :
“Le tissage des thèmes est resserré sur une péripétie fictionnelle de 48 heures – durée tragique pendant laquelle il ne se passe rien. Rien et tout. Rien : l’arrivée d’un régiment en cantonnement dans un village du nord de la France près du front ; la misère des paysans ; l’apparition d’un personnage féminin et l’écho d’un vaudeville campagnard avec adultère, cocufiage, inceste et vendetta ; la mort d’un cheval, veillé et enterré ; le départ du régiment. Tout : la mort alentour du paysage et des personnages à vau l’eau ; l’agonie humaine du cheval et du camarade juif ; la tragédie “atridesque” des déchirements de famille, de classe, de race ; la prise de conscience cynique des frustrations d’une jeunesse sacrifiée, n’ayant plus foi ni idéal, son massacre annoncé dans une guerre absurde, invisible, désespérée. Déréliction et apocalypse.”
Mireille Calle-Gruber