Performances culturelles du genre 2016-2017

Organisateurs : Anne Castaing, Fanny Lignon, Mehdi Derfoufi (UNIL/ICAV); Tiziana Leucci (CNRS/CEIAS); Gianfranco Rebucini (IIAC/LAIOS/EHESS)

L’étude de la performance dans le champ académique a connu depuis les années 1960 de multiples évolutions. A travers la notion de "performativité" développée par John L. Austin, les Performance Studies problématisent les analyses visuelles et textuelles des représentations en resituant dans les corps en action (dans le langage, les gestes, les rituels...) la capacité d’agir des individus et des groupes sociaux. Dans les années 1970-1980, les apports des féministes et des artistes au champ des Performance Studies contribuent à ouvrir de nouveaux espaces déterminants pour l’expression des minorités de genre, de race et de classe. Judith Butler, notamment, déploie le concept crucial de performance comme l’espace privilégié où se déploie le sujet, se construisent et se déconstruisent les identités, comme le lieu de la formulation mais également celui de la transgression. Elle signale ainsi l’inscription culturelle de cette performance, nourrie d’un faisceau de signes et de pratiques culturellement ancrées, comme elle signale la capacité du sujet à s’en extirper par la réappropriation de ces signes et ces pratiques.
Dans la continuité du séminaire « Performances culturelles du genre » qui se tient à Paris depuis 2 ans, cette troisième année propose d’explorer différents lieux de la culture pour penser non seulement le genre comme une pratique culturelle, historiquement et géographiquement située, mais également la création comme un lieu de performance et de transgression des identités dans leur complexité. La performance permet de souligner les prédicats culturels de la construction binaires des identités sexuées.
A partir de différents médias et supports culturels (la danse, le cinéma, mais aussi la littérature et les jeux vidéos) comme témoins des affirmations identitaires complexes, ce séminaire interdisciplinaire s’intéressera plus particulièrement à la question des travestissements, phénomènes culturellement marqués de transgression des identités de genre.

Séances du séminaire

Séance(s) passée(s)

  • Camille Bloofield (paris 13) : Michèle Métail, poétesse femme dans un groupe d’hommes : une performance involontaire du genre
  • Michel Bondurand-Mouawad : Le War Porn et les genres visuels travestis

    Si la Guerre du Viêt-Nam et celle du Golfe avaient donné les premières occasions de spectacles immédiats sur les écrans installés dans les foyers américains, les guerres d’Afghanistan et d’Irak laissent apparaître une innovation supplémentaire : celle permise par l’enregistrement direct et intempestif d’images prises à la volée par les soldats grâce à leurs téléphones portables. Ces images – extrêmement violentes et non soumises à l’approbation de la hiérarchie militaire - ont trouvé leur place au sein de plateformes de diffusion de contenus pornographiques.
    Au fil du temps, ces images de guerre ont parfois remplacé les contenus pornos en s’y substituant. Certaines plateformes se sont spécialisées dans la diffusion de ces images et leur fermeture a été demandée par l’armée américaine qui s’inquiète de leur révélation au public civil à travers une campagne médiatique de dénonciation qui forge immédiatement l’étiquette de War Porn pour qualifier ces images.
    Mon intervention présentera un état des lieux chronologique et typologique afin de familiariser l’audience à ce contenu visuel qui sera interrogé sous plusieurs angles. La problématique générique permet de réfléchir à l’apport de ces images dans les discussions actuelles autour de la définition de la pornographie dite « 2.0 », notamment ses modes de diffusion et de consommation. On se demandera si le qualificatif de pornographique pour ces images de guerre ne sert qu’à valider un jugement dépréciatif opposable à tout contenu perçu comme culturellement illégitime ou s’il permet de mettre en lumière une nouvelle fonction culturelle de l’expression pornographique. Enfin, on soulignera le constat paradoxal qui montre que des organisations officiellement allergiques au contenu pornographique vu comme le marqueur principal d’une culture occidentale décadente – notamment les organisations politiques islamistes telles qu’Al-Qaida et DAECH – utilisent cependant volontiers ces réseaux de distribution et la modalité expressive pornographique pour former leurs propres images de propagande.

    Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle - Salle 123
    13 rue de Santeuil 75005 Paris

  • Biliana Vassileva : Le genre « voyageur » : danse contemporaine en Israël et à Taiwan
  • Florian Voros : Performances intimes de la virilité et constructions hégémoniques de la masculinité
  • Amina Damerji (Casa de Velasquez) : Trouble dans l’engagement : performance de genre et dissidence poétique dans la Révolution cubaine
  • Le mariage « homosexuel » de Ksar el-Kebir. Quand la sexualité efface le genre au Maroc.
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